UN RENOUVEAU DE L' AFFICHE

Au XXe siècle, dans les années soixante-dix, les très rares graphistes (le terme n’existe pas encore) qui militent pour ce media le font dans les domaines culturel, social et politique. Cette production de format limité n’existe en général qu’en affichage sauvage. Si la qualité de ce travail artistique et militant est reconnue sur la scène internationale, celui-ci n’en demeure néanmoins que très marginal. Mais le fossé entre les affiches d’agence et les affiches de créateurs est creusé. Deux logiques de communication s’affrontent : l’une inféodée à l’argent, l’autre attachée à l’utopie de la création. Paradoxalement, le renouveau de l’affiche de création est partiellement dû au système publicitaire et à son évolution.

LES "SUCETTES" DE L'ABRIBUS

C’est en effet l’afficheur Jean-Claude Decaux qui eut l’idée originale d’inventer un nouveau support : l’abribus. Il propose aux municipalités de l’installer et de l’entretenir gratuitement. Ainsi naît l’idée de mobilier urbain, comme support de publicité : une formule qui remporte d’emblée un énorme succès. Elle fait de son inventeur le leader mondial de ce type d’affichage. La particularité française vient de ce que cet afficheur, sansdoute pour mieux emporter la décision, propose de n’utiliser que l’une des deux faces des surfaces d’affichage, laissant à disposition des municipalités l’usage de l’autre. Voilà qui répond au désir naissant des petites et moyennes structures de développer leur communication propre. C’est pourquoi aujourd’hui, partout en France, on trouve des “sucettes” bifaces, avec d’un côté des publicités nationales de parfum ou lingerie... pour ne parler que des plus frappantes, et de l’autre, des communications locales.

Michał Batory

Christophe Gaudard

UNE COMMUNICATION DE CRÉATION

Une ville de cent mille habitants affiche de cette façon de cent à cent cinquante messages différents par an, d’où un marché remarquable. Phénomène très rare, certaines municipalités, sous l’impulsion de leur maire ou de leur chargé de communication, veulent avoir une communication de création. Quant aux directeurs des scènes nationales, ils mettent souvent un point d’honneur à confier leur communication à un graphiste de renom. Ce qui explique pourquoi nombre de graphistes parisiens travaillent actuellement pour la province. Cette production est d’un faible coût, car l’affichage est gratuit. Aujourd’hui, les nouvelles technologies ont diminué par dix le prix de l’impression. Le format normalisé est celui de la publicité : 176 x 120 cm. Les tirages sont en général assez limités (cent à deux cents, voire cinquante exemplaires), raison pour laquelle on imprime plutôt les affiches en sérigraphie

UN TYPE D'AFFICHE EN SURSIS

La présente exposition témoigne d’un particularisme à une époque donnée, celle de ces dix dernières années. Nul ne peut dire si ce type d’affiche perdurera. Qui sait si ces images ne seront pas bientôt remplacées par des images électroniques ? A voir donc, de toute urgence, à Genève, au Salon du Livre, au stand J1260 de Radio Zones.

Alain Le Quernec